Dans le transport maritime ou l’énergie, les actionnaires travaillent à défendre leurs super-profits. Dans le commerce, des débats différents s’annoncent : les actionnaires accepteront-ils une baisse temporaire de la rentabilité pour financer les transformations digitale et RSE ?
C’était déjà dur avant le retour de l’inflation. Aujourd’hui, l’équation est imparable :
- baisse des volumes, claire depuis septembre, et qui va durer autant que l’inflation
- hausse des coûts, qui va s’accélérer en janvier et entretenir l’inflation
- besoin urgent de financer les transitions digitale et RSE.
La plupart des retailers sont loin d’avoir fini leur transition digitale. Ils doivent assumer des investissements technologiques massifs, tout en basculant une partie du CA vers des modèles moins rentables.
La transition RSE sera encore plus délicate à financer. Si sa nécessité est évidente, ne nous racontons pas d’histoires : elle ne sera pas relutive. Je répète souvent que « seuls les efforts rentables sont durables »… mais rentable, ça ne veut pas dire « qui crée du résultat à court terme ». Ça veut dire « qui augmente la valeur de l’entreprise », parce que si vous ne conduisez pas ces transformations, de toutes façons la valeur de l’entreprise est… zéro.
Le financement de ces mutations est une gageure. Les marchés financiers continuent de financer plus volontiers des pure players non rentables que la transformation des retailers historiques.
So what ? Faut-il ralentir pour préserver les ratios d’ebitda ? Évidemment non : lever le pied, c’est baisser les bras. C’est retarder pour mieux sauter un mur qui sera de plus en plus haut. Et un jour finir comme Camaïeu : l’une des caractéristiques du court terme, c’est qu’il ne dure pas longtemps.
Il ne s’agit pas de dire aux managers « tu as le droit de ne plus gagner d’argent». Il s’agit d’admettre que l’entreprise ne vaut déjà plus grand chose, sauf à accepter un effort temporaire (3 ans ?) dans le cadre d’une feuille de route ambitieuse. Cela suppose d’avoir confiance dans les résultats de cette transformation, dans le management, dans les équipes.
Mon message est donc simple :
- les années qui viennent vont être dures
- il faut absolument maintenir ou accélérer le rythme des transformations
- ce sera impossible à faire sans éroder la rentabilité
- cet effort temporaire sera formidablement créateur de valeur puisqu’il conditionne la performance durable des entreprises
- il revient aux dirigeants de construire des plans de transformation ambitieux qui méritent la confiance des actionnaires
- il revient aux actionnaires d’admettre que sans cet effort, ils ont déjà perdu.
Et il revient aux consultants de dire la vérité, de contribuer à construire des projets inspirants, d’aider à les mettre en oeuvre.
Vous trouvez cette analyse déprimante ? Moi pas. Elle nous dit qu’il est temps d’y aller, d’être ambitieux et de se faire confiance. Que le sauvetage des entreprises et leur adaptation au nouveau monde dépend de nous.
Le préalable : être lucide sur ce qui vient…
Cordialement
Cédric Ducrocq
PDG du Groupe Diamart