L’une des tendances les plus frappantes dans le retail est l’irruption fracassante de nouveaux types d’acteurs : les pure players (Amazon, Venteprivée.com, eBay…) et demain d’autres entreprises technologiques (Google…) ; des industriels, de plus en plus nombreux à verticaliser leur distribution pour offrir des « univers de marque » complets (Apple, Nespresso, Nike… mais aussi La Belliloise, Lindt ou les marques de luxe) ; demain des assureurs ou d’autres grands acteurs des services. Il est fascinant et inquiétant que les modèles de distribution les plus admirés depuis 10 ans soient Amazon, Nespresso et Apple store : où sont passés les distributeurs ?
Au-delà de la menace que cette ruée vers le retail représente pour les distributeurs « traditionnels », elle oblige à s’interroger sur leur vocation. Quoi de commun entre Carrefour, une banque de détail, Yves Rocher, un restaurant, Amazon, la SNCF, Apple et le PMU ? Ils sont tous en interaction directe avec les clients : leur vocation n’est pas de distribuer des produits et services, mais de manager des interactions avec les clients-shoppeurs-usagers.
Peut-être devrions-nous redéfinir la vocation du Groupe Dia-Mart comme « experts en interactions clients ». Après tout, notre croissance ces dernières années s’est largement faite sur des métiers connexes à la distribution : tourisme (ClubMed…), banque de détail (Crédit Agricole…), Horeca (Quick…), industriels ouvrant des magasins (Lafarge…), etc.
Le retail de demain, au-delà des aspects propres à chaque métier, sera l’art d’optimiser l’interaction avec les clients : comment faire pour que la rencontre entre l’offre et le shopper produise une « déflagration d’énergie commerciale »… et fasse crépiter les caisses ? Comment se mettre aux côtés du client pour co-construire avec lui un scénario d’achat gagnant ? Comment entrer dans la tête et dans la vie du client, sans être jamais intrusif ni donneur de leçons ? Et surtout, comment penser des organisations capables d’optimiser cette interaction clients malgré la pesanteur des process et l’inévitable « facteur humain » au moment de vérité ?
Curieusement, cette communauté d’enjeux, de méthodes et d’initiatives ne dispose par du vocabulaire ni des concepts dont elle a grand besoin. Il n’existe même pas de mot pour désigner simplement cet ensemble. Les anglo-saxons parlent de « customer facing », terme qui désigne les secteurs, dont le retail, où l’entreprise interagit directement avec le client final, qu’elle leur vende des produits (distribution) ou des services (banque, transports, immobilier, etc.). Mais « customer facing » ne convient pas du tout : il véhicule l’idée d’un retailer qui « fait face » à ses clients, alors que le retailer de demain devra se tenir « aux côtés » de ses clients pour les accompagner dans leur achat. La bonne façon de le dire tourne sans doute autour des notions « d’interaction », « d’interface » (ce qu’ Eglier et Langeard appelaient « servuction« , c’est à dire la production du service en interaction avec les clients) : j’offre une mission de conseil gratuite à celui qui invente le mot juste ;-).